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Invisible, Paul Auster


"Le hasard ne compte pas lorsqu'il s'agit d'événements réels, et le seul fait qu'une chose est improbable ne signifie pas qu'elle ne peut se produire."

Déroutant. C'est le qualificatif qui me semble le plus approprié pour le roman Invisible, de Paul Auster. Un peu comme lorsque vous pensez que vous êtes sur le point de boire un verre d'eau, et qu'une fois que le liquide a franchi le seuil de vos lèvres, vous vous rendez compte que c'était de la vodka. Ou l'inverse. Ou quand vous pensez que vous allez soulever une bouteille très lourde, et que vous êtes surpris·e par l'effort inutile déployé dans vos muscles car elle était en réalité très légère. Ou l'inverse. Bref, vous voyez la sensation dont je veux parler ? Celle de croire que vous pouvez anticiper tout un tas de choses - en l'occurrence pour Invisible, la suite de l'intrigue et les intentions de l'écrivain - puis de se planter royalement. De se tromper. Ou d'être trompé·e ?

Difficile de vous fournir un résumé représentatif de cette oeuvre ... je préfère préserver les effets de surprise qui ont très bien fonctionné sur moi. Mais comme je suis une blogueuse sympa, je vous livre le point de départ : New York, 1967, un jeune étudiant américain rencontre lors d'une soirée un professeur français accompagnée d'une femme aussi mystérieuse que séduisante. Vous traverserez ensuite autant d'épisodes dramatiques que de saisons rythmant une vie, et voguerez de personnage en personnage, dont la consistance est le point fort du livre : Paul Auster leur confère une psychologie intéressante, pétrie de nuances et d'éléments inavouables, de pulsions sordides voire parfois malveillantes. Bref, que ça fait du bien de croiser des personnages qui frôlent la réalité, bien loin du manichéisme basique des personnages de Ken Follett que je vous dénonçais il y a peu !

L'autre particularité de ce roman est de jouer sur les formes de récit, la première surprise étant que l'auteur fait fi de la ponctuation traditionnelle et conventionnelle attendue dans les dialogues. Les différences de modes narratifs sont au service d'un labyrinthe d'histoires sur l'identité, sur le pouvoir de la séduction et du sexe, maîtrisé ou indompté, constructif ou ravageur, glorificateur ou culpabilisant. Entre la côte est américaine et Paris, suivez donc le sombre sillage d'antihéros englués dans la vie, "car la triste réalité demeure : il y a beaucoup plus de poésie en ce monde que de justice."

"Vive l'Amérique, Adam, conclut-il en versant une dernière rasade de cognac dans nos deux verres. Vive nos ténèbres intérieures."

Et pour rester dans la même ambiance, ou presque... (Cliquez donc !)

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