“ Alors chacun se relaxa, les têtes se relevèrent, et certains étendirent les jambes en s'étirant. C'était une bonne nouvelle, ils n'allaient pas gratter des pages mais se laisser raconter une histoire, une de celles bien bonnes à entendre, ils allaient profiter de cette heure à regarder Livio faire le show, même si le but n'était pas de se divertir, mais c'était du pareil au même, ils allaient être pénards pendant qu'un autre s'y collait, c'était le principe même de l'exposé, ils allaient avoir peur pour lui, qu'il bafouille, qu'il se trompe, qu'il dérape, et en même temps ils avaient envie de cela, du grain de sable qui ferait de ce moment un événement et sortirait chacun de sa routine, ils espéraient du piquant et de la sensation.”
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Après la méthode "valeur sûre" (en lisant une œuvre d'une autrice que j'aime beaucoup, Toni Morrison), j'ai testé la technique "livre court". Je ne sais pas comment se passe le confinement de votre côté (dites-moi tout, ça m'intéresse !), mais du mien, ça produit de drôles d'effets sur mon rapport à la lecture. Moi qui m'enthousiasmais à l'idée de pouvoir faire baisser drastiquement ma pile à lire pendant cette quarantaine, j'ai rapidement déchanté. Impossible de passer de longues heures dociles à lire un livre car en ce moment, mon esprit ressemble plus à une balle rebondissante qu'à une pensine dans laquelle je pourrais tranquillement tamiser mes réflexions littéraires (coucou les rediffusions de Harry Potter à la télé qui me font le plus grand bien !). Je papillonne, je m'éparpille, je volette d'activité en activité.
Comme il m'est difficile de me concentrer longuement, j'ai jeté mon dévolu sur un livre recommandé par ma Super Libraire du Grenier d'Abondance : Jour de courage, de Brigitte Giraud. Grand format, 160 pages, gros caractères, mise en page aérée : le terrain était pleinement dégagé pour un bon moment de lecture. Et je me suis régalée.
Ma Super Libraire ne m'avait pas donné beaucoup d'informations sur l'intrigue (je lui fais une confiance aveugle), je l'en remercie et comme elle, je vais vous en dire peu pour vous laisser le plaisir de la découverte (petite pensée en passant à Potes en papier, qui décèle mieux que quiconque les quatrièmes de couverture qui divulgâchent tout). Sachez seulement que le point de départ est un exposé que doit faire un lycéen sur l'un des premiers autodafés nazis. Faire un exposé... qui se souvient de cet exercice, de ce passage presque obligatoire lorsqu'on arpentait les couloirs du collège ou du lycée ? Si le nom de Magnus Hirschfield vous dit quelque chose, cela vous donnera peut-être des indices sur la thématique traitée dans cette histoire. Sinon (ce qui était mon cas), vous en apprendrez beaucoup.
J'ai adoré la première partie de ce Jour de courage. J'aime ces histoires dans lesquelles on entre sans devoir toquer à la porte : quelques phrases, deux-trois paragraphes, et on y est. Le style de Brigitte Giraud est fluide, accrocheur, et le tableau vivant qu'elle dresse d'une classe lycéenne de banlieue particulièrement réussi. La seconde partie m'a laissée sur ma faim mais il me tarde de lire d'autres œuvres de cette autrice tant sa plume m'a plu !
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