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Le Dimanche des mères - Graham Swift


“ C'était le dimanche des mères 1924. Une coutume bien différente de cette absurdité que l'on appelle de nos jours fêtes des mères. Et elle n'avait pas de mère, voyez-vous. Elle avait grandi dans un orphelinat, puis elle avait été placée comme domestique. "Placée", encore une expression que l'on n'entend plus guère aujourd'hui, mais un autre "départ dans la vie" qu'elle recommandait à tout aspirant écrivain (quoique difficilement recommandable en 1980 ou 1990). Vu qu'il faisait de vous un observateur professionnel de la vie, du dehors vers le dedans ”


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30 mars 1924, Berkshire, sud de l'Angleterre. Dimanche des mères, qu'on appellera plus tard fête des mères. Jane Fairchild, jeune domestique orpheline, monte sur sa bicyclette pour traverser la campagne et profiter de ce congé, loin de la famille aristocrate qu'elle sert. Comme toute journée de l'existence humaine, ce dimanche sera bien ordinaire pour certains et il réservera des surprises à d'autres. Ce qui attend Jane au bout du chemin ? Vous le saurez en la suivant le temps d'un court roman, en serpentant parmi ses pensées et les secrets qui façonneront sa vie...


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Après l'avoir découvert dans le recueil de nouvelles De l'Angleterre et des Anglais, quel plaisir de retrouver la plume de Graham Swift ! Pas besoin de descriptions minutieuses, ni d'enrobages psychologiques usant. Quelques lignes, et vous voilà dans la peau d'un personnage. Si vous avez la bonne idée de lire Le Dimanche des mères, vous verrez cette journée du 30 mars 1924 à travers le regard de Jane : ses attentions à certains éléments du décor dues à son travail de domestique, son décryptage des aristocrates qu'elle côtoie, si proches et pourtant si loin d'elle. Et non seulement vous jouirez de ce regard vers l'extérieur, mais plus intéressant encore, vous plongerez dans l'esprit de Jane : dans ses rêveries, dans ses désirs, dans le flot de ses pensées qui zigzaguent entre le passé (la Seconde Guerre mondiale n'est pas loin), le présent (ce curieux dimanche des mères) et le futur (que l'auteur révèle avec malice dans la dernière partie du livre, en semant des indices tout au long du roman).


J'ai aimé ce goût d'interdit, ce rythme ni lent ni expéditif, ce jeu entre l'exceptionnel et l'ordinaire. La précision et l'amour des mots jalonnent ce récit sans pudeur mais gorgé de sensualité. Graham Swift est décidément très fort pour distiller des réflexions profondes sous un vernis de banalité. Je suis donc preneuse de tout autre titre de cet auteur que vous pourrez me recommander !

 

Le Dimanche des mères, de Graham Swift, collection (176 pages, 7,50 €)

Merci à la librairie Le Grenier d'abondance pour ce bon conseil !

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