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Etat de nature - Jean-Baptiste de Froment


“ L'essentiel, le voici : de toute éternité, il n'y a de pouvoir que s'il y a des gens pour obéir. Le pouvoir, ce n'est même que cela : le fait que les gens obéissent, fassent ce qu'on leur dit de faire. Retirez cette obéissance, cette soumission, et tout s'écroule comme un château de cartes. ”


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Et voilà le petit dernier de la sélection pour le prix du meilleur roman 2020 des éditions Points ! Ce marathon de lecture se clôture par une belle surprise avec Etat de nature, de Jean-Baptiste de Froment. Je n'osais plus trop espérer découvrir un roman qui me déverrouille les zygomatiques, tant les neuf premiers candidats baignaient dans la noirceur. Finalement, Etat de nature a dépassé mes espérances : certains paragraphes m'ont déclenché de francs éclats de rire et je l'ai presque trouvé trop court tant il se lit vite.


“ Farejeaux était un de ces élus de province qui, à force de banquets, se mettent à ressembler physiquement aux spécialités culinaires de leur circonscription.”


Avec un incipit fracassant présentant le quotidien de Claude, homme politique à la tête de la "commanderie d'Etat", nous plongeons au cœur d'une intrigue aux allures de conte ou de fable. En effet, de par leurs qualités et leurs défauts finement décrits, les personnages de ce roman auraient tout à fait leur place aux côtés des animaux de Jean de La Fontaine. Notre cher Claude rêve d'être "calife à la place du calife". Avide de pouvoir, il n'a qu'un seul objectif : prendre la place de l'actuelle Présidente de la République (ironiquement surnommée "la Vieille" par le peuple français). Il devra pour cela freiner la popularité grimpante de Barbara Vauvert, une Marilyn politique des temps modernes, ancienne sous-préfète de la Douvre fraîchement limogée et adulée par ses concitoyens. Sans compter les autres combines sournoises de l'élite politique parisienne...


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Par une plume incisive et satirique, Jean-Baptiste de Froment nous livre une savoureuse parodie de la France et de sa vie politique. Du nom des patelins imaginaires jusqu'aux détails de légendes locales (Ah, cet Adamont le Borgne !), son roman regorge de trouvailles toutes plus drôles les unes que les autres. On aurait presque envie d'y croire tant elles flirtent avec le réel, et le cynisme de l'auteur fait presque regretter feu l'humour des guignols de l'info. Allons-même plus loin : Etat de nature est un Groland raffiné créant l'occasion de rire de l'échiquier politique qui parfois nous assomme. Le règne de la communication, les rebondissements liés à la vie privée des politiciens, les mouvements de protestation : toute case de ce jeu est finement explorée car Jean-Baptiste de Froment taquine avec intelligence notre démocratie.


Hobbes et Rousseau n'ont qu'à bien se tenir : l'heure du retour à l'état de nature a peut-être sonné. En attendant, c'est le gong de la fin de mon aventure de jurée qui retentit !

 

Etat de nature, de Jean-Baptiste de Froment, aux éditions Points (240 pages, 7,10 €)

Merci aux éditions Points pour l'envoi du livre dans le cadre du prix du meilleur roman 2020 des éditions Points !

 

Mon avis sur les autres candidats au prix du meilleur roman 2020 des éditions Points :


  1. Roissy, de Tiffany Tavernier

  2. Les Enfants de cœur, de Heither O'Neill

  3. Manuel de survie à l'usage des jeunes filles, de Mick Kitson

  4. Désintégration, d'Emmanuelle Richard

  5. L’Été des charognes, de Simon Johannin

  6. Midi, de Cloé Korman

  7. Les Enténébrés, de Sarah Chiche

  8. Le Plongeur, de Stéphane Larue

  9. Voyou, d'Itamar Orlev

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