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La Disparition de Josef Mengele - Olivier Guez


"A la fin des années 1940, Buenos Aires est devenue la capitale des rebuts de l'ordre noir déchu. S'y croisent des nazis, des oustachis croates, des ultranationalistes serbes, des fascistes italiens, des Croix fléchées hongrois, des légionnaires roumains de la garde de fer, des vichystes français, des rexistes belges, des phalangistes espagnols, des catholiques intégristes ; des assassins, des tortionnaires et des aventuriers : un Quatrième Reich fantôme."

Je ne sais pas ce qu'il en est pour vous, mais, personnellement, quand j'ai entre les mains un ouvrage qui a gagné le prix Renaudot, mes attentes sont plutôt élevées. Le fil rouge du livre en question avait attiré mon attention : la cavale d'un ancien nazi en Amérique du Sud, c'est le genre d'histoire qui peut être un excellent canevas pour un roman.

Sauf que ... j'ai vraiment du mal à considérer La Disparition de Josef Mengele comme un roman. Il en a certes les atours, mais s'apparente dans sa majeure partie à un grand reportage d'un journal tel que Le Monde. Cette assimilation à un documentaire n'enlève rien à l'importance du sujet qu'il traite, ni à la qualité de la plume qui l'a rédigé, mais je n'ai jamais tourné les pages de ce livre avec frénésie. La proportion entre des passages au style journalistique (disons 70 % du livre) et des descriptions animées de la vie de fuyard du "médecin d'Auschwitz" (les 30% restants) aurait sûrement gagné à être inversée. A la fin de son ouvrage, Olivier Guez confesse par ailleurs que "seule la forme romanesque [lui] permettait d'approcher au plus près la trajectoire macabre du médecin nazi".

Les parties imaginées autour de l'exil de Mengele permettent ainsi de nouer entre elles les explications sur le contexte politique et historique des Etats d'Amérique du Sud après la seconde guerre mondiale, notamment l'Argentine dirigée par le couple Perón, et de tisser le portrait glaçant d'un fol exécutant de la sinistre politique du führer. Passionné de génétique, Josef Mengele était en effet chargé de la sélection des personnes à envoyer dans les chambres à gaz à Auschwitz, et profitait de cette tâche pour choisir les sujets (notamment des jumeaux) de ses expérimentations les plus sordides.

En fuyant son Allemagne tant aimée pour s'expatrier en Argentine, alors sanctuaire nazi, celui qu'on surnommera "l'ange de la mort" se retrouve pétrifié par l'angoisse permanente d'être pourchassé : la peur qu'il faisait régner à Auschwitz change de camp, le traqueur devient traqué. Jamais terrassé par les regrets, ni saisi d'une once de remise en question de ses actes, le nazi n'en finit pas d'estomaquer le lecteur de par son nombrilisme et son absence absolue d'empathie pour ses victimes, se concentrant uniquement sur sa crainte d'être reconnu.

"Les nazis en exil ne connaîtront plus la paix. S'ils veulent sauver leur peau, ils doivent s'exclure, renoncer aux réjouissances terrestres, se condamner à une existence clandestine de fuyards, à une cavale sans refuges ni repos."

A défaut de pouvoir le graver dans le marbre, l'auteur tatoue le nom de Joseph Mengele sur le papier afin qu'il ne sombre jamais dans l'oubli. Une contribution au devoir de mémoire qu'on ne peut que saluer, en dépit d'un rythme que j'aurais souhaité plus dynamique.

Et pour rester dans la même ambiance, ou presque... (Cliquez donc !)

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