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Qui m'a fait caca sur la tête ?, Oh Yeong Jin


Je ne sais pas ce qu'il en est pour vous, mais, en ce qui me concerne, on ne m'a jamais lu l'histoire De la petite taupe qui voulait savoir qui lui avait fait sur la tête - un best-seller de la littérature jeunesse - quand j'étais petite. Je vous raconte ça parce que, quand j'ai vu cette BD sobrement intitulée Qui m'a fait caca sur la tête ? chez mon libraire, je suis restée dubitative. Je me méfie un peu de ces titres racoleurs (et qui titillent néanmoins ma curiosité, il me faut bien vous l'avouer), gardant en tête le courroux d'un ancien professeur de lettres contre l'ouvrage Comment chier dans les bois qui a réussi l'exploit de devenir lui-aussi un best-seller. D'ailleurs, en faisant des recherches pour rédiger cet article, j'ai eu la surprise de découvrir sur Amazon que les "produits" suivants étaient "fréquemment achetés ensemble" : Comment chier dans les bois + L'art de péter + Comment ne pas devenir un vieux con. Tout un programme.

Revenons à nos petits moutons laineux. Sceptique quant à la qualité de la BD dont il est question dans cet article, je demandais donc l'avis de mon libraire sur celle-ci, qui m'expliquait alors que c'était une adaptation de l'histoire pour enfants de la petite taupe, version coréenne sarcastique. Et comme je ne connaissais alors pas cette histoire, je n'ai pas acheté la BD sur le coup.

Et puis, ça m'a travaillé, et une fois partie en vacances, je me suis dit "pourquoi pas". Je me suis entrée dans la première boutique de BD croisée dans les rues d'Aix-en-Provence, et j'ai demandé au libraire la bouche en cœur : "Bonjour, est-ce que vous auriez la BD "Qui m'a fait caca sur la tête ?" ?". Je ne vous raconte pas le fou-rire du libraire.

Bref, cette longue introduction pour finalement vous faire part de mon avis mitigé sur cette bande dessinée réalisée par Oh Yeong Jin. Tout comme De la petite taupe qui voulait savoir qui lui avait fait sur la tête, l'intrigue de Qui m'a fait caca sur la tête ? repose sur la recherche du coupable d'un étron expulsé sur la tête d'une petite taupe dans la version enfantine, et sur la tête d'un homme qui dort sous les ponts dans la version coréenne. Si l'enquête de la petite taupe se cantonne à l'interrogation des animaux qui l'entourent, notre sans-abri rencontre lui un à un tous les suspects, jusqu'à remonter aux hautes sphères du pouvoir politique, résolu à ne pas céder à la loi du plus fort. Bafoué dans sa dignité, il rencontre tout d'abord un avocat spécialiste des droits de l'homme, qui le renvoie vers la police afin qu'elle détermine si les excréments sont d'origine humaine ou canine, qui le renvoie vers le balayeur du pont d'où a été envoyée la crotte, qui le renvoie vers son patron, qui le renvoie vers la mairie, etc.

Vous l'aurez deviné, cette bande dessinée fait un beau pied de nez aux systèmes dans lesquels chacun cherche à fuir ses responsabilités en se déchargeant sur l'autre. L'une des répliques du fonctionnaire de la mairie illustre parfaitement cet engrenage infernal : "Vous savez, je ne suis qu'un simple fonctionnaire, à mon niveau je n'ai aucun pouvoir. Je ne fais qu'obéir aux ordres ...". Une logique apparemment absurde mais qui repose sur une habitude à laquelle nous avons tou·te·s été un jour ou l'autre confronté·e·s ou à laquelle nous avons participé. Cet album est un bel écho aux livres sur l'indignation ou la désobéissance civile qui fleurissent dans nos librairies, notamment depuis la publication de l'essai de Stéphane Hessel Indignez-vous ! en 2010.

Petites ombres au tableau : un dessin peu sophistiqué qui manque parfois de charme, et une fin qui n'est pas à la hauteur du déroulement de l'histoire. Crotte alors !

Et pour rester dans la même ambiance, ou presque... (Cliquez donc !)

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