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Ils vont tuer Robert Kennedy, Marc Dugain


Avant de rentrer dans le vif du sujet, petit avertissement préalable : ce livre comporte des scènes pouvant ne pas convenir à un public lassé des baratins politiques qui trouent actuellement moult journaux et reportages télé comme un gruyère. Et si vous n'êtes pas un tantinet intéressé·e par l'histoire et/ou la politique américaine, passez votre chemin.

Parce que ce roman, c'est du costaud. Pas le genre de bouquin dont feuilletez quelques pages une pâquerette à la bouche en attendant que le beurre que vous venez de sortir du frigo se ramollisse pour pouvoir aisément vous préparer une bonne tartine, par exemple. Sa lecture nécessite un minimum de concentration. Et je vous avoue que si certains livres ont la capacité de me tenir en éveil jusqu'au chant du coq, j'ai bien faillir sortir des allumettes pour maintenir mes paupières écartées à la lecture de certains passages de Il vont tuer Robert Kennedy.

Deux intrigues, deux recherches de la vérité, cette vérité qui "avance en crabe avec parfois de curieux déhanchements". D'un côté, une analyse sur l'assassinat de John Fitzgerald Kennedy, 35ème président des Etats-Unis et le parcours de son frère, Robert Kennedy, "Bobby", après ce drame. De l'autre, une investigation effectuée par le narrateur, professeur canadien d'histoire contemporaine, sur le rôle joué par son père - psychiatre pratiquant l'hypnose sur des patients revenus des camps nazis - dans la mort des politiciens précités. Deux enquêtes, "telles deux droites non parallèles en géométrie", qui sont, vous vous en doutez, "vouées à se rejoindre".

Je sens bien que les premiers paragraphes de cet article n'encouragent pas vraiment à entamer les 400 pages de ce roman de Marc Dugain, pourtant rudement bien écrites, mais honnêtement, sa lecture vaut le coup pour les nombreux éléments d'information sur la période qui s'écoule de la mort de John Kennedy, le 22 novembre 1963, à celle de son frère, le 5 juin 1968. On (re)découvre une Amérique tiraillée entre envies de révoltes nourries de ségrégation raciale, et pacifisme du mouvement hippie, un pays tourmenté par de nombreux conflits qui hanteront les décennies suivantes : guerre du Vietnam, question cubaine, chasse aux communistes, bras de fer avec l'URSS, etc. Voilà le tableau au sein duquel est dépeint Bobby Kennedy, personnage souvent laissé dans l'ombre, rare membre de la famille échappant au credo paternel selon lequel la sexualité est distincte de l'amour, et qui se retrouve en première ligne d'un échiquier politique après l'assassinat de son frère qui l'a plongé dans une profonde dépression.

Malheureusement, l'intrigue fictive autour des parents du narrateur ne fait pas le poids face aux thèses très intéressantes sur les assassinats des frères Kennedy, dont les versions officielles présentent le curieux point commun de contenir de nombreuses incohérences (adeptes des théories du complot, bonjour !). C'est le travers des histoires qui reposent sur des ressorts psychiatriques : le lecteur est peu enclin à tomber dans les filets jetés par l'auteur dont il connaît la possibilité de brouiller la réalité avec les produits de l'imagination.

Bref, avis en demi-teinte pour ce roman de la rentrée littéraire 2017. Rendez-vous au prochain article ?

Et pour rester dans la même ambiance, ou presque... (Cliquez donc !)

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